La vie invisible d'Eurídice Gusmão
- VO
Printemps 2011, Jean François Sivadier met en scène La Traviata, à Aix en Provence, sous la direction de Louis Langrée. Natalie Dessay est Violetta. Pendant deux mois, des salles de répétitions aux coulisses du Théâtre de l’Archevêché, une équipe de cinéma a suivi leur travail au plus près.
Sans jamais avoir recours à la moindre voix off, le réalisateur nous convie à un making of qui ne se résume pourtant pas à une unique plongée dans les coulisses d’un chef d’œuvre. En suivant pas à pas les répétitions, le cinéaste respecte scrupuleusement la chronologie du livret. Par cette astuce de montage, le documentariste arrive à nous expliquer le rôle de chaque intervenant tout en racontant finalement l’histoire de La Traviata et en nous faisant profiter des plus beaux airs d’une œuvre en tous points somptueuse.
Recherche des émotions, mouvements des corps, tessiture des voix : Philippe Béziat nous rend tout cela à fois familier et nouveau. Souvent drôle, évidemment bouleversant. Splendeur et magie d'un work in progress.
De même qu’elle brûle les planches, Natalie Dessay crève l’écran, de ses grands yeux avides de mieux discerner, percevoir, humer presque, le geste et son idée ; de son corps menu mais qui sait se tordre comme un arbre noueux ; de son visage expressif mais capable de s’absenter à lui-même pour mieux être traversé par l’Autre. De sa voix elle aussi consumée, enfin, offrande au théâtre et au public qui fit le prix de sa Traviata, et fait toute l’exceptionnelle importance de cette artiste. D’un montage poétique et ingénieux, qui couvre chronologiquement le déroulé des trois actes de l’opéra mais ne s’interdit pas les sauts dans le temps et les lieux, on retient la chute au sol de Violetta-Natalie, vertigineusement tournoyante, répétée avec acharnement, montée en boucle au point d’en devenir infinie.
Une approche sensible et sensorielle de l'opéra. D'une caméra à la fois réfléchie et intuitive, toujours à bonne distance des chanteurs, Philippe Béziat saisit les instants de doute, de quête fébrile ou de rivalité sourde. Superbe.
Sans commentaire et avec pour fil rouge la transformation graduelle de Natalie Dessay en Violetta, son film restitue les meilleurs moments de ce travail de création. Cette précieuse occasion d'observer une star du lyrique avec un grand metteur en scène à l'ouvrage prend la forme d'un vrai plaisir de cinéma.
Béziat reste attentif à des détails qui semblent minuscules, à des débats de mise en scène qui semblent ne pas avancer. C'est tout cela pourtant qui fait le travail et donne corps à l'oeuvre, au point qu'il ne soit pas nécessaire d'en montrer la représentation finale. Les non-initiés trouveront peut-être l'exigence trop grande. L'ensemble forme un document d'exception, aussi fin qu'inventif, qui éclaire admirablement l'opéra.
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